dimanche 18 mars 2018

Je cherche des noisettes dans les bois de mon atelier

Après mes excursions, j'invite la nature à venir passer quelques jours chez moi; C'est alors que commence ma folie. Le pinceau à la main, je cherche des noisettes dans les bois de mon atelier. J'y entends chanter les oiseaux, les arbres frisonner sous le vent, j'y vois couler ruisseaux et rivières chargés des mille reflets du ciel et de la terre. Le soleil se couche et se lève chez moi.
Jean Baptiste Camille Corot
cité par Olivier Cena
Télérama 3555 du 28/02/2018 


Bouquet du dimanche



jeudi 15 mars 2018

Phébus à bloc



Oh comme ça cognait
Phébus à bloc
On s’abritait dans la forêt

Mille sentiers nous parcouraient
Mille odyssées à notre porte
Les cohortes d’ennui filaient
On le savait, elles reviendraient

Nous avions toute latitude et toute la vie
Toute latitude et toute la vie
Aucun engagement d’aucune sorte
Et pour seule devise : « Peu importe »

Oh ça louvoyait comme anguille
Dans les ruisseaux qui serpentaient
Mains des garçons, cheveux des filles
Et on se cherchait dans les bois
Certains se trouveraient, d’autres pas
Mais s’en moquer, qui oserait ?

Même aujourd’hui, qui oserait ?

Nous avions toute latitude et toute la vie
Toute latitude et toute la vie
Aucun engagement d’aucune sorte
Et pour seule devise : « Peu importe »

Mais depuis
Mais depuis

Oh un jour plus rien ne meurt jamais
Toute l’eau stagne dans le puits
On revient seul dans la forêt
Comme hier, se mettre à l’abri
Même si le soleil a pâli
Voilé par tous les jours d’après
On revient seul, dans la forêt

Nous avions toute latitude et toute la vie
Toute latitude et toute la vie
Aucun engagement d’aucune sorte

Nous avions toute latitude et toute la vie
Toute latitude et toute la vie
Aucun engagement d’aucune sorte

Et pour seule devise : « Peu importe »

Mais depuis

Dominique A / Toute latitude

Après huit mois d'absence


vendredi 9 mars 2018

Comme quand on retrouve une ancienne planche contact

Les reprendre un à un, les épousseter, les ouvrir un instant comme quand on regarde d'anciennes planches contact et les ranger à leur nouvelle place.


Secrétariat perpétuel de la présence

La photographie est un secrétariat perpétuel de la présence.
Le photographe se promène, il est en balade, il a appris ça depuis longtemps.
Aussitôt que Niepce eut rangé le premier appareil, les photographes (mais comment les appelait-on au début ? ) se sont précipités sur l'aubaine, ils sont partis voir le monde, voir à quoi ça ressemblait, voir à quoi ressemblaient les gens et ce qu'ils faisaient. Comme s'ils ne le savaient pas, comme s'ils n'avaient jamais vu un enfant qui rit, le visage fermé d'un mort, un paysan en train de faucher, comme s'ils n'avaient jamais assisté à un mariage ou à un enterrement , comme s'ils ne savaient pas à quoi ressemble une femme qui vous regarde, un homme tirant sur sa pipe, un matelot qui fait sa sieste, un bébé qui sort de sa mère tout pressé d'en découdre, un môme qui va à l'école et qui se marre.
Même les paysages, c'est comme s'ils ne les avaient jamais vus avant de sortir avec leur appareils photo : les rochers, les arbres, lesrivières, les routes, les carrioles qui passent, un peuplier qui frémit dans le vent, les voitures qui font la course, leur cousine qui retrousse ses jupes pour sauter au bas du mur, un simple chien dans un tournant de route, des amoureux qui s'embrassent au milieu d'une marée humaine qui passe sans rien voir, le pinceau des phares dans la nuit, un ivrogne qui n'apprécie pas qu'on s'occupe de lui, un soldat fauché en pleine course sur une pente de colline.
Ils regardent tout, ils surveillent tout, ils épient le moindre geste, ils font le guet devant des miroirs, en bas des escaliers, dans une chambre vide, dans une cour de ferme où les gens s'assemblent, devant une fenêtre qui ouvre sur la campagne : ils sont d'une patience incroyable ; ils sont dans le temps réel et la grandeur nature ; avec joie, avec angoisse, fébrilement, l'air apaisé, l'oeil conquérant, nerveux, conquérants, alanguis, possessifs ou mine de rien.
En voiture, ils sont à la place du mort, ils ont le vent en poupe, à l'intérieur, ils sont gais comme des pinsons, dehors geint une misère pâle, peu importe ; d'une seconde à l'autre le monde peut avoir tiré sa révérence et il ne prévient pas.
Qui a dit que les mots précédaient la métaphore ?
Denis Roche,
Le boîtier de mélancolie
Hazan
p.171


Les tropiques dans le dos