samedi 23 mars 2019

Juste une question d'instrument


J'ai longtemps été fasciné par les pianistes d'ambiance.
Un type qui traîne dans un grand restaurant chic des films américains de l'entre-deux guerres
Un type que personne écoute et qui sert surtout à camoufler ce qu'il se dit à la table d'à côté
Avec style et plus de classe qu'un juke-box
Celui qui fait semblant de se moquer de l'indifférence général...et qui joue pendant des heures
Et la famille est fière de le citer parce que c'est l'artiste de la famille
Mais une fois qu'on a dit ça on sait plus trop quoi dire d'autre
Et on sort des séries d'évidences, de gros lieux communs comme «il est gentil
Mais c'est comme tous les artistes il est feignant». C'est peut-être vrai quelque fois...
Hormis ceux qu'on réussit alors là on dit: «Vous avez du travaillez beaucoup pour en arriver là!»
J'ai longtemps voulu être celui que l'on regarde avec un petit sourire plein de circonspection
Parce qu'on le trouve étrange, il est pas comme tout le monde
Celui qu'on comprend pas bien, celui qu'on fait semblant de pas voir quand on le croise
Parce qu'il colle pas avec le décor...
Parce qu'on a peur de tout ce que l'on ne connaît pas, de tout ce que l'on ne comprend pas
Parce que les étrangers que l'on préfère encore c'est les étrangers de couleurs parce qu'on les repère de loin...

Les Pianistes d'ambiances de Charlélie Couture

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